De CINÉMA
I
POUR CARLOS
REICHENBACH, APRÈS AVOIR VU UN DE SES FILMS
Enseigner/apprendre à regarder
c'est ne pas avoir peur des symboles
voir le monde avec des yeux de cinéaste
voir le cinéma avec des yeux de poète
savoir que la force des opérations magiques
réside dans leur répétition
et que le haut est en fait le bas et le mal extrême le bien
savoir qu'il a toujours été là - juste ça - un fil sur le gouffre
et le traverser c'est la même chose
que parcourir la ville
au hasard
et que le plein est le vide
parce que dans le cinéma aussi
il y a des sorciers
enceints d'images
explosant en métaphores et en visions
faisant parler le langage
à travers les couleurs
montrant comment trouver
les pistes des chemins parmi les souterrains
POÉSIE PICTURALE, VISUELLE : SYMBOLOGIE DE L'EAU
Quand la plage où vous êtes est ressentie comme réelle
uniquement parce que cela vous rappelle clairement les odeurs, la clarté et les
bruits d’une autre plage où vous avez déjà été il y a longtemps
quand rien ne reste plus sauf l’impression que vivre est
inutile et que mourir est quelque chose de complètement idiot.
filtrée par une sensation de sublime,
d’avoir les pieds sur la terre
ou peut-être
quand je suis rentré chez moi, très tôt le matin, j’ai eu
l’impression que s’ouvrait devant moi un gouffre, passage vers un autre plan où
se rencontrent les rues Pernambuco, Rio de Janeiro et le square Villaboim, et
ceci m’a fait réaliser que jusqu’à ce jour je n’ai rien fait d’autre que suivre
les pas de ma propre mort,
quand la vie n’est rien d’autre qu’un prétexte :
alors, sélectionner pour publication ce qui est le plus étrange, anguleux,
géométrique mais sans être d’équerre, et qui peut être récité sur un ton tout à
fait innocent, presque surpris, simulant quelqu’un faisant semblant de croire à
ce qu’il dit.
(Traduction : Madeleine Favre)